Trombone et basson : l’heure est grave !

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Trombone et basson : l’heure est grave !

Habitués aux mélodies en sous-sol au coeur de l’orchestre, où leur registre grave les rend moins évidemment audibles que d’autres instruments, le basson et le trombone se tailleront la part du lion lors de deux concerts Happy Hour. Louise Ognois et Guillaume Brun, respectivement trombone et basson solos de l’Orchestre du Capitole, ont participé à l’élaboration de ces programmes où ils assureront par ailleurs des parties virtuoses. Pièces savamment choisies, invités de marque… vous ne pourrez plus ne plus les entendre comme avant !

Entretien avec Louise Ognois et Guillaume Brun

Pour commencer, pouvez-vous nous présenter votre instrument et sa famille ?

Guillaume Brun : Le basson appartient aux instruments à vent. Sa particularité : il est à anche double, comme le hautbois, dont il est en quelque sorte le grand frère. Il existe deux sortes de bassons : le basson français et le basson allemand. Au Capitole, nous jouons exclusivement le basson français. Il existe aussi le contrebasson, beaucoup plus long et volumineux, qui joue dans un registre encore plus grave.
Louise Ognois : Dans la famille des cuivres, le trombone se distingue par sa coulisse, alors que les instruments de la même famille utilisent plutôt des palettes ou des pistons. Les trombonistes d’orchestre doivent maîtriser plusieurs instruments, définis par leur poste, donc le registre où ils évoluent : le trombone alto, le trombone ténor et le trombone basse, parfois même le trombone contrebasse.

Comment avez-vous concocté les programmes de ces concerts ?

G.B. : Estelle Richard [autre bassoniste solo de l’Orchestre, NDLR] et moi avons eu carte blanche. Comme nous avions très envie de jouer ensemble, nous avons choisi un concerto pour deux bassons de Vivaldi – en fait, un concerto initialement écrit pour deux violoncelles. Si une autre pièce soliste, Andante et Rondo hongrois de Weber, figure au programme, nous avons aussi tenu à montrer la beauté du basson au cœur de l’orchestre avec la suite de Pulcinella, du Stravinski pur jus, où le basson tient un rôle majeur dans absolument chaque mouvement. Et comme il aurait été dommage de ne pas en profiter pour mettre le contrebasson en vedette, notre contrebassoniste Marion Lefort va elle aussi jouer une pièce concertante.
L.O. : La cheffe a été motrice dans le choix des pièces symphoniques du programme. L’Ouverture tragique de Brahms donne à entendre de jolis chorals, de très belles phrases au trombone. Quant à la Grande Pâque russe, elle donne un rôle important au second trombone, dans le registre médium. Nous allons ainsi mettre en avant notre nouvelle recrue dans le pupitre, Louis Darmaillacq. Le programme se distingue surtout par la création d’un concerto pour trois trombones de Thierry Caens, intitulé Tribones. Tout un panorama : un premier mouvement jouant sur les contrastes entre les solistes et l’orchestre, une romance qu’il qualifie de « pop et tendre », une danse sur des rythmes espagnols offrant un bel échange avec les percussions, et un final éclatant.

Ces deux Happy Hours sont l’occasion d’inviter des musiciens de renom : Sophie Dartigalongue, bassoniste dans les orchestres les plus prestigieux, qui dirigera le concert, et Joël Vaïsse, tromboniste installé aux États-Unis qui poursuit également une belle carrière en Europe. Connaissez-vous déjà ces artistes, et comment appréhendez-vous ce concert ensemble ?

L.O. : Grand tromboniste international, Joël Vaïsse a joué au sein de l’Orchestre du Capitole pendant un an. C’est justement pour partager la scène avec lui que nous avons passé commande d’un concerto pour trois trombones : les parties solistes sont ainsi assurées par les deux trombones solos actuels du Capitole, c’est-à-dire David Locqueneux et moi-même, et notre invité de marque. Je l’ai connu à l’Académie de cuivres et percussions de Surgères : cela me fait drôle de passer ainsi de stagiaire à collègue !
G.B. : En effet, Sophie Dartigalongue est une grande jeune bassoniste dont je connais très bien les enregistrements. Nous n’avons encore jamais joué ensemble bien qu’elle soit venue récemment participer à une série de l’orchestre, dont j’étais absent. J’ai donc hâte de jouer sous sa direction.

Avez-vous un solo préféré dans le répertoire, et un autre que vous redoutez particulièrement ?

G.B. : Plus qu’un simple solo, j’adore jouer toute l’œuvre de Chostakovitch. Dans sa Neuvième Symphonie, il donne au basson un magnifique solo de près de 5 minutes, déchirant, où le musicien a vraiment tout le loisir de s’exprimer. Quant à celui que je redoute le plus, c’est celui du Boléro, que je vais expérimenter très bientôt sous la direction de Josep Pons…
L.O. : Pour les trombonistes, le Boléro représente aussi le solo le plus difficile, le plus risqué, le plus extrême. Parmi mes favoris, il y en a un que je rêverais de jouer, tiré d’un opéra rarement mis à l’affiche : Hamlet, d’Ambroise Thomas. Nous venons de jouer la Symphonie n°2 « Résurrection » de Mahler sous la direction de Tarmo Peltokoski : elle donne dans son entier de beaux moments à notre pupitre, avec en particulier un choral magnifique dans le dernier mouvement.

Y a-t-il un préjugé qui vous agace sur votre instrument ?

L.O. : On nous voit comme un instrument qui ne joue pas beaucoup, mais compter les mesures peut s’avérer redoutablement difficile, et très fatigant, aussi ! Et quand nous jouons, on nous entend énormément.
G.B. : Nous avons la réputation d’être les « petits rigolos » de l’orchestre… Alors qu’il n’y a pas que nous ! Je nous trouve même très sérieux.

En tant que musicien, appréciez-vous le format du concert Happy Hour ?

L.O. : Nos spectateurs sont très chaleureux et beaucoup viennent à notre rencontre devant la Halle aux grains à la sortie des concerts. Ces concerts Happy Hour, avec leur côté interactif, accroissent la sensation d’échange. J’apprécie aussi de voir le public aussi nombreux pour ces spectacles-là que pour nos concerts symphoniques.
G.B. : Construire un concert autour d’un instrument de l’orchestre, dans un format et à une heure qui convient à toute la famille, cela me plaît énormément ! Le violon, le violoncelle, le public les connaît ; c’est moins le cas du trombone et du basson. Le public ne vient d’ailleurs pas seulement pour écouter, il vient découvrir. Quant à nous, musiciens, cela nous permet de jouer des concertos, ce dont nous n’avons pas l’habitude : je trouve ce défi très plaisant à relever.

Propos recueillis par Mathilde Serraille


Les concerts

Happy Hour avec le basson

Samedi 25 janvier – 18h

Happy Hour avec le trombone

Samedi 22 mars – 18h